En économie, le
coût d'opportunité désigne le coût d'une chose estimé en termes d'opportunités non-réalisées (et les avantages qui auraient pu être retirés de ces opportunités), ou encore la valeur de la meilleure option non-réalisée. Plus trivialement, c'est la mesure des avantages auxquels on renonce en affectant les ressources disponibles à un usage donné.
En matière de gestion, le coût d'opportunité d'un Investissement est le coût de la non-réalisation d'un investissement. Il est mesuré par la Rentabilité attendue des fonds investis (ou de l'affectation d'immobilisations à d'autres utilisations, comme par exemple, la location d'un terrain disponible). Ce critère est l'un de ceux utilisés dans les choix d'investissement. En principe, le rendement est au minimum égal au coût d'opportunité.
En matière de Finance c'est la rentabilité qu'aurait un placement de même risque que celui réalisé ou envisagé. Il sert à faire des arbitrages entre placements.
En économie (Macroéconomie), il est bon de tenir compte des externalités positives et négatives pour établir un coût d'opportunité complet.
L'application du concept de coût d'opportunité conduit à la recherche des coûts cachés de toute décision économique. La négligence de ce concept conduit à des sophismes économiques courants tels que celui de la « vitre brisée » décrit par Frédéric Bastiat.
Coût d'opportunité et utilisation du temps
Le rapprochement est parfois fait avec l'utilisation du temps selon le proverbe : "le temps c'est de l'argent". En effet, si on reste une heure sans rien faire, c'est une heure de perdue, une heure où on ne travaillera pas (et donc où on ne sera pas rémunéré).
Ce concept a aussi provoqué des changements substantiels dans nos sociétés :
- la volonté d'aller plus vite (Avion de plus en plus rapide, réalisation de plus de choses en même temps (portable : téléphoner en voiture, dans les transports en commun...)),
- la division du travail (initiée par le Taylorisme et le Fordisme).
Coût d'opportunité et situation de risque
Par ailleurs cette notion n'a de sens que si les comparaisons entre la chose réalisée et la chose non réalisée sont deux choses à
risque égal ! Sinon il faut introduire les notions de
risque et
Prime de risque.
Il faut aussi prendre en compte le fait que les éléments extérieurs ne sont pas statiques, ce qui peut influer sur la satisfaction des choses (par exemple une voiture ne produit de satisfaction que s'il y a des routes, s'il n'y en a pas elle ne sert à rien ; or les routes sont des éléments extérieurs à la voiture) ; ceci se traduit par l'expression "toute chose étant égale par ailleurs (ou Ceteris paribus pour les latinistes)", qui est donc utilisée pour présenter un risque nul (non changement de la situation globale dans le temps).
Exemples pédagogiques
Hypothèses :
- votre budget consacré au transport est limité, les sommes ci-dessous représentent donc une valeur (chaque euro procure une certaine Satisfaction).
- vous habitez dans la banlieue d'une ville.
- Le bus, mettant le même temps que vous en voiture et allant à la même destination, coûte 1€ (aller).
- En allant en ville en voiture, vous dépensez 1,5€ en essence (nous pourrions rajouter l'usure des pneus, l'huile, l'assurance, risque d'accident etc.).
Ainsi, si vous descendez en ville en voiture, votre coût d'opportunité sera de 0,5€ (1,5 - 1 = 0,5), soit 1€ pour l'aller retour. En effet, si vous descendez en ville en bus, vous dépenserez 0,5€ de moins qu'avec votre véhicule, soit un gain de 0,5€, ou en termes économiques un coût d'opportunité nul (car le bus est, dans cet exemple, considéré comme le moyen de transport le moins cher et le plus rapide)
Pour compliquer, nous pourrions modifier les hypothèses de départ, en prenant en compte que le bus met plus de temps que votre voiture à arriver en ville (il doit s'arrêter à des arrêts de bus), mais qu'avec votre voiture vous devez vous garer en ville (et donc trouver une place, ce qui est parfois long, et en plus la payer !) etc. etc.
Imaginez-vous dans la situation suivante : vous gagnez un ticket gratuit pour assister à un concert d'Eric Clapton. Vous ne pouvez revendre ce ticket. Bob Dylan se produit également en concert ce soir-là et il s'agit - pour vous - de la meilleure option parmi les autres activités possibles. Les billets pour le concert de Bob Dylan sont en vente à 40 euros. Par ailleurs, vous seriez toujours prêt à payer 50 euros n'importe quel soir pour aller voir Bob Dylan.
Question: Sur la base de ces informations, quel est le coût d'opportunité associé au concert d'Eric Clapton ?
Réponse: Le coût d'opportunité est de 10 euros. Il s'agit de l'avantage auquel vous renoncez en assistant au concert d'Eric Clapton.
Supposons un taux de profit de 5% dans un secteur de production quelconque (représentant donc un certain risque). Ceci signifie que sur les 10 firmes de ce secteur, les 10 ont (en moyenne) une rentabilité de 5% par an pour le même risque. Vous êtes un investisseur et vous souhaitez placer votre argent : 100 000 Euros. Vous êtes interessé par ce secteur, et tout particulièrement par une entreprise qui vous parait plus prometteuse que les autres (pour des raisons x ou y). Vous choisissez donc de placer dans cette entreprise, mais à la plus grande surprise, elle n'a une rentabilité que de 4% ! Ce qui fait 4 000 Euros de gains. Outre le fait que vous soyez déçu, le coût d'opportunité ici est de 1% (sur le capital investit, par exemple pour 100 000€, cela fait 1 000€ de coût). En effet, si vous aviez placé dans une autre entreprise du secteur (avec donc le même risque), vous auriez gagné la somme de 5 000 Euros (et non seulement 4 000€,ce qui représente un coût de 5 000 - 4 000 = 1 000 Euros).
Par ce raisonnement, nous pouvons donc expliquer pourquoi des entreprises réalisant du profit (comptable) délocalisent, s'automatisent, se réorganisent, changent d'orientation, etc. afin d'augmenter leur profit (et donc diminuer le coût d'opportunité de leurs investisseurs, qui préfèreront placer ailleurs si ce coût est trop élevé...).
La sphère monétaire serait donc liée à la sphère réelle (débat qui anime les économistes, voir la théorie quantitative de la monnaie).
Historique de la notion
Le coût d'opportunité est associé à une controverse célèbre entre économistes du début du siècle dernier, controverse opposant les économistes britanniques disciples de
Marshall et les économistes continentaux du courant néo-autrichien :
- Pour les Britanniques, le coût est une notion technique, c'est la dépense nécessaire pour produire quelque chose.
- Pour les Autrichiens, le coût résulte de la Demande car c'est elle qui fixe le niveau de Production en fonction de la disposition à payer ce coût de la part des acheteurs. Cette demande dépendant de la satisfaction retirée par les acheteurs, c'est en définitive l'Utilité et non la technique qui fait le coût des choses. Dans ce contexte la notion de coût d'opportunité est une machine de guerre des néo-autrichiens visant à ruiner la notion technologique de coût des Britanniques. Le coût d'opportunité est ce à quoi renonce l'acheteur en terme de satisfaction en acceptant de payer le coût de l'option qu'il choisit en définitive.
La notion de coût d'opportunité n'a de sens que si « quelque chose » est fixe, ou plus exactement limité, dans le raisonnement. Reprenons l'exemple précédent. Le choix porte sur deux options : Clapton contre Dylan. Les 50 euros de « disposition à payer » correspondent bien à l'idée de la demande pour Dylan. Les 10 euros correspondent bien au coût d'opportunité d'aller voir Clapton. L'élément « fixe » ici, c'est le temps disponible : Dylan et Clapton passent le même soir, et vous ne pouvez pas assister aux deux concerts au même moment. Si Dylan était passé un autre soir, il n'y aurait eu aucun coût d'opportunité : vous seriez allé voir les deux tout simplement.
Le problème plus profond que soulève cette notion est alors de savoir s'il existe des choses « fixes » dans une économie. Pour le temps disponible ou l'espace (à défaut de don d'ubiquité) cela est certain, mais est-ce suffisant ? L'opinion courante des économistes est que le coût d'opportunité ne peut trouver son application que dans le cas de ressources « rares », c’est-à-dire limitées. Cela a conduit certains économistes à limiter l'objet de l'économie à des situations de ressources « rares » (on retrouve encore la trace de cela dans tous les manuels d'économie), une position de repli sage, car nul ne sait très bien à quoi pourrait ressembler une science économique où il n'y aurait pas de limites fixées à l'extérieur du système économique quant à la disponibilité des biens.
Voir aussi